Un silence troublant, qui questionne notre conscience. C’est celui que j’ai ressenti en visitant l’exposition « Les décrets du Lieutenant du Royaume de 1945 à l’origine de l’autonomie spéciale de la Vallée d’Aoste », organisée pour le 80e anniversaire des décrets du Lieutenant du 7 septembre 1945. Une salle riche de documents et de photographies qui devraient transmettre fierté et appartenance, et qui semblent pourtant plongés dans un vide qui les rend presque invisibles.
Ce silence est le même qui, depuis quelque temps, recouvre le débat public sur l’Autonomie. Un silence qui pèse plus que les mots : car si, en campagne électorale, l’Autonomie n’est plus au cœur du débat, si elle est traitée comme un sujet acquis ou superflu, alors cela signifie que nous sommes en train de perdre le sens même de notre identité.
Réfléchir à l’Autonomie, c’est penser notre avenir
Et pourtant, il ne s’agit pas d’un débat stérile ni d’un simple exercice de mémoire : réfléchir à l’Autonomie, c’est s’interroger sur qui nous sommes et sur qui nous voulons être demain, Nous, Valdôtains de naissance, d’adoption ou de choix. Les décrets du Lieutenant et le Statut spécial ne furent pas de simples actes formels, mais la base d’un long et difficile chemin qui a permis à cette terre de s’autogouverner pendant de longues années. Un chemin qui, aujourd’hui, semble suspendu : étouffé, d’un côté, par ceux qui s’opposent plus ou moins ouvertement au régionalisme et à l’autonomisme ; de l’autre, par une politique souvent résignée à gérer uniquement le présent, sans volonté ni vision pour poursuivre l’autonomie concrète et responsable de nos pères.
La question que nous devons nous poser est simple : voulons-nous encore être à la hauteur de cet héritage ou préférons-nous nous contenter de vivre sur ses acquis, en oubliant que derrière ces prérogatives il y a eu des luttes, des sacrifices, voire des vies brisées ? Perdre cette mémoire, c’est condamner nos racines à l’atrophie. Et sans racines, il n’y a plus d’identité possible.
De la mémoire au quotidien: une responsabilité vivante
Les documents exposés au Palais régional méritent d’avoir une place permanente dans un musée de notre histoire et, plus encore, de faire partie du parcours éducatif de chaque Valdôtain. Car le risque que nous courons est évident : une Autonomie célébrée lors des commémorations mais vidée de son sens au quotidien, réduite au silence non seulement par la politique mais aussi par notre indifférence.
Un silence troublant, oui. Cependant, il existe aussi la possibilité de le transformer en voix. Une voix qui proclame que l’Autonomie n’est pas un vestige à exposer tous les quatre-vingts ans, mais une responsabilité vivante, qui nous engage chaque jour. À nous, en tant que communauté, de décider si nous voulons continuer à suivre la voie de l’autogouvernement réel ou si nous préférons laisser ce silence devenir le refrain de notre capitulation.





